Transcription du courrier du préfet adressé aux maires de Lezennes et Villeneuve d'Ascq.

Ce courrier est consultable en mairie dans le dossier d'enquête relatif au permis de construire du Grand Stade

 

 

Monsieur le Maire,

 

Dans le cadre de l'ouverture prochaine de l'enquête publique relative au permis de construire du futur Grand Stade sur les territoires des communes de VILLENEUVE D'ASCQ et de LEZENNES, je vous prie de bien vouloir trouver ci-dessous l'avis environnemental des services de l'Etat concernant l'étude d'impact du dossier de permis.

 

Le dossier présenté concerne la création du futur Grand Stade Lille Métropole sur les communes de VILLENEUVE D'ASCQ et LEZENNES. Ce projet appartient à un programme plus vaste comprenant le stade proprement dit, les aménagements routiers et piétonniers nécessaires pour maximiser l'usage des transports collectifs pour l'accès au stade et les aménagements routiers et piétonniers nécessaires à l'écoulement du flux de circulation prévisionnel généré et au stationnement.

 

A ce titre et conformément au IV de l'article L. 122-3 du code de l'environnement « Lorsque la totalité des travaux prévus au programme est réalisée de manière simultanée, l'étude d'impact de chacune des phases de l'opération doit comporter une appréciation des impacts de l'ensemble du programme ». Le dossier contient une présentation du programme mais l'évaluation des incidences du programme sur l'environnement est insuffisante car trop générale. Pour être conforme à l'article L. 122-3 du code de l'environnement, l'étude d'impact présentée doit donc être complétée par une analyse des effets cumulés sur l'environnement du programme global, en particulier en phase travaux (conditions de déplacement, nuisances sonores, émission de gaz à effet de serre, pollutions, ressource en eau). Cette évaluation des incidences du programme doit en particulier intégrer les incidences des travaux préparatoires visant le traitement des carrières souterraines.

 

En ce qui concerne la prise en compte des richesses naturelles et les espaces naturels agricoles (2° de l'alinéa II de l'article R. 122-3 du code de l'environnement), le dossier présente certaines imprécisions. Ainsi, malgré une expertise écologique portant sur un cycle biologique complet, l'état initial pour le volet faunistique et floristique est imprécis et général. L'expertise floristique n'indique pas la liste des espèces inventoriées, leur localisation, leur protection, leur statut de rareté et de menace. Le volet faunistique est encore plus vague, le dossier parle en effet d'espèces potentielles sans indiquer si celles-ci ont été observées ou pas.

 

La méthodologie déclinée en page 165 ne permet pas de savoir si des prospections spécifiques ont été réalisées pour les oiseaux et surtout pour le chiroptères et les micro mammifères alors même que le site présente de fortes potentialités pour ces espèces (existence de catiches). Cet aspect est d'autant plus dommageable que la plupart des espèces de chiroptères et d'oiseaux sont protégées ainsi que leurs habitats associés au titre de l'article L. 411-1 du code de l'environnement. De surcroît, ces groupes sont de très bons indicateurs de la fonctionnalité des corridors biologiques.

 

L'état initial concernant le fonctionnement écologique du site et son rôle dans les équilibres biologiques locaux est inexistant.

 

L'analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur la faune et la flore, les sites, les milieux naturels et les équilibres biologiques, est, elle aussi, inexistante alors que le site constitue un refuge de biodiversité au sein d'un tissu urbanisé dense. De surcroît, le dossier en page 58 précise que deux habitats d'intérêt communautaire ont été recensés : les pelouses à Calamagrostis epigejos, faciès pauvre en espèces des formations herbeuses à Nardus et les lisières humides à grandes herbes, faciès à caractère rudéral des mégaphorbiaies hygrophiles d'ourlet planitaires et des berges montagnard à alpin. L'intérêt de ces habitats est indépendant de la définition d'une zone de conservation spéciale. Ainsi, des mesures de réduction d'impact et/ou compensatoires semblent souhaitables pour ces enjeux.

 

 Les mesures proposées dans le dossier vis à vis de la préservation de la faune, la flore et les milieux naturels s'apparente plus à de l'intégration paysagère qu'à une réelle démarche en faveur de la biodiversité. La mesure visant à recréer un espace vert au niveau du triangle de la borne de l'espoir en compensation de la destruction de la butte n'est pas vraiment une mesure compensatoire liée au projet dans la mesure où, d'une part, au niveau du site de la borne de l'espoir, il existe déjà des milieux recolonisés naturellement intéressants (cf. carte des habitats page 60) et où, d'autre part, la décision de créer cet espace vert est antérieur à l'identification des incidences du projet puisque « Ce projet d'espace vert envisagé par LMCU figure sur les plans du PLU ».

 

L'adjonction de l'expertise écologique à l'étude d'impact permettrait de vérifier la conformité du dossier avec les prescription des articles L. 122-3 et R. 122-3 du code de l'environnement relatifs au contenu réglementaire des études d'impacts.

 

Le volet eau de l'étude d'impact est incomplet et ne permet pas d'appréhender correctement l'état initial du site.

 

La présentation du contexte hygrogéologique  est trop succincte et lacunaire surtout dans une zone :

 

Un diagnostic des disponibilités des ressources en eau souterraine, principale ressource en eau potable de la région est indispensable dans la mesure où des prélèvements en phase chantier sont envisagés. Compte tenu du déficit en eau de la masse d'eau concernée et dans la mesure où ces prélèvements d'eau serviront principalement à l'arrosage des pistes et à la fabrication du béton, il semble dans le cadre de la démarche HQE prônée par le maître d'ouvrage, d'envisager par exemple la récupération d'eau pluviale en phase chantier.

 

Les volets hydrologique, hydraulique et hydro-biologique sont inexistants alors que le site se situe au niveau du bassin versant de la Marque, zone inondable reconnue puisque la vallée de la Marque fait l'objet d'un Plan d'Exposition aux Risques d'Inondation prescrit. La présentation de ces volets pour les cours d'eau du secteur d'étude est indispensable dans la mesure où ils semblent constituer les exutoires des eaux de ruissellement.

 

 Par ailleurs, le dossier présente une certaine ambiguïté quant au devenir des eaux de ruissellement puisqu'en page 117 il est indiqué « les eaux collectées seront rejetées vers le réseau communautaire », or en page 94 de ce même dossier il est précisé que « Le terrain d'assiette du projet se situe en tête de deux bassins versants d'assainissement gérés par LMCU ». Cette imprécision ne permet donc pas d'identifier l'exutoire final des eaux de ruissellement et donc d'évaluer clairement les incidences du projet sur la ressource en eau et en particulier les conditions d'inondation aval.

 

De plus, le projet prévoit l'aménagement de bassins de tamponnement équipés de débourbeur séparateur à hydrocarbures avant rejet à 2l/s/ha. Cependant, il est difficile d'apprécier si cette gestion ne va pas engendrer de dysfonctionnements hydrauliques et aggraver les conditions d'inondation en aval. La réalisation d'une étude hydraulique permettant d'apprécier les conditions de ruissellement des eaux pluviales du site actuel (sans aménagement) et selon différents régimes de pluies comparées au fonctionnement attendu de l'aménagement permettrait d'apporter des éléments de réponse sur ce aspect. Le dossier ne précise pas l'exutoire final des eaux de ruissellement.

 

Conformément aux dispositions du SDAGE Artois-Picardie, la gestion des eaux de ruissellement à la parcelle et donc l'infiltration doit être privilégiée. La gestion des eaux de ruissellement prévue sur le site ne semble donc pas compatible avec les dispositions C19 et D10 du SDAGE. Des techniques dites alternatives pourraient être envisagées comme la réduction des surfaces imperméabilisées, récupération des eaux de pluie, la mise en place de chaussées réservoirs et de toitures et parking végétalisés. Or aucune de ces techniques ne semble employée ni même étudiée dans le cadre de ce projet. Le dossier précise en page 115 que l'infiltration n'a pas été retenue comme moyen principal de gestion des eaux pluviales en raison de la faible perméabilité des terrains superficiels, nécessitant une consommation d'espace importante pour la création de bassins d'infiltration. Cependant aucun test de perméabilité ne vient démontrer ce postulat. De surcroît, les pages 49 et 117 précisent que la nappe souterraine est vulnérable compte tenu du faible recouvrement par des limons et qu'à l'heure actuelle « La configuration actuelle du site de la Borne de l'Espoir entraîne l'infiltration ou l'évaporation de la majeure partie des eaux météoriques plutôt que leur reprise dans un réseau d'assainissement existant ».

 

Compte tenu de ce qui précède, et considérant que le projet de stade (14ha) est susceptible de s'implanter sur le site de la borne de l'espoir d'une surface totale d'environ 30ha, la mise en oeuvre de l'infiltration de l'ensemble des eaux pluviales du site semble réalisable d'un point de vue technique (perméabilité de sol et disponibilité du foncier).

 

Des mesures visant à recycler partiellement les eaux pluviales de toitures pour les usages sanitaires et l'arrosage de la pelouse sont envisagées et sont à souligner. Ces mesures visant à limiter les pressions exercées sur les ressources en eau potable et à limiter les rejets vers les eaux superficielles, doivent être généralisées à l'ensemble des eaux de ruissellement.

 

En ce qui concerne la problématique des nuisances liées aux déplacements (nuisances sonores, pollution, émission de gaz à effet de serre), il semble qu'en phase d'exploitation, ces nuisances ont correctement été prises en compte puisque des aménagements favorisant les modes de déplacement alternatif à la voiture ont été prévus. Cependant, il ne semble pas y avoir eu de démarche similaire pour la phase chantier puisqu'il est prévu environ 280 passages de camions par jour et 520 passages de véhicules légers. L'incidence de la phase chantier intégrant la phase préparatoire visant le traitement des carrières ne semble pas avoir été correctement prise en compte puisque aucune mesure de réduction d'impact n'est proposée. Ainsi, des mesures de réduction d'impact visant à limiter le nombre de rotation de véhicules sont attendues (gestion des remblais in situ, utilisation de tranport alternatif...).

En ce qui concerne les enjeux liés à la réduction des émissions de gaz à effet de serre : en matière d'économie d'énergie, le projet prévoit la production d'énergie par la mise en place d'une éolienne et la production de chaleur et de froid par une pompe à chaleur et des panneaux photovoltaïques ce qui mérite d'être souligné. Ces aménagements auraient pu être généralisés au delà des seuls besoins énergétiques de l'habitation du gardien.

 

En conclusion, l'étude d'impact doit être complétée par des éléments d'analyse des incidences globales du projet et du programme sur l'environnement pour être en conformité avec les articles L. et R. 122-3 du code de l'environnement.

 

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Maire, l'expression de mes sentiments les meilleurs.